Un peintre de fleurs hollandais à Paris, de l'Ancien Régime à l'Empire

Fortune critique

« On a dit de ces fleurs, et la critique a paru moins ingénieuse, que toutes belles qu’elles étaient, on pourrait bien leur reprocher de manquer d’odeur. Rien n’égale en effet, l’éclat et la vivacité de leur coloris, mais y trouve-t-on ce léger duvet, cette espèce de vapeur qui pourrait seule rappeler à la vue l’idée des doux parfums qu’elles exhalent ? Le duc d’Enghien, un enfant de huit à neuf ans, demeurait enchanté devant ce beau vase de fleurs ; on lui présenta l’artiste. Ah ! Monsieur, lui dit le jeune prince avec une ingénuité pleine d’esprit et de grâce, voudriez-vous bien me permettre d’en prendre une ? »

Denis Diderot, Héros et martyrs. Salons de 1769, 1771, 1775, 1781. Pensées détachées sur la peinture, Livre IV, Paris, Hermann, 1995, 457 pages.

« Parlerais-je […] du laborieux Van-Spaendonck (sic) ? Ses fleurs sont un chef-d’oeuvre. Ce genre, poussé à cette perfection, a son mérite ; il rend la nature dans toute sa vérité. Mais lorsqu’on songe qu’une goutte d’eau répandue sur cette feuille de rose lui a coûté des journées entières de peine et de travail, l’on admire le talent de cet artiste laborieux, sans conseiller à personne de l’imiter. »

Stanislas Kosta Potocki, Lettre d’un étranger sur le Salon de 1787, s.l, s.d, 32 pages.

« Ainsi, poète sans le savoir, et naturaliste sans le vouloir, il [Gerard van Spaendonck] sut, non plus par des fictions aimables et cependant trompeuses, mais par l’enchantement même de la réalité, faire parler de nouveaux aux fleurs une langue à la fois philosophiques et poétique ; en sorte que ses tableaux, après avoir opéré les séductions qui tiennent l’accord des couleurs, appelant l’intelligence et l’admiration d’une autre espèce d’harmonie, font voir qu’ils ne montrent, portent l’imagination bien au-delà des sensations dont la vue, et vot jusqu’à faire servir l’art de démonstration de la science. […] »

Antoine Chrysostome Quatremère, dit Quatremère de Quincy, « Eloge historique de M. van Spaendonck », Séance publique de l’Académie royale des Beaux-Arts, du 5 octobre 1822. Présidée par M. Guérin, Paris, Firmin Didot, 1822, p.6.

[…] Remplacer la nature ? Mais non, apprendre à la voir se faire. Ce que font les élèves de Spaendonck, et son propre frère Corneille, démontre qu’on ne peut plus ignorer distraitement la flore et que la Nature attend d’être dite pour se réveiller. […]

Philippe Sollers, Fleurs. Le grand roman de l’érotisme floral, Paris, Hermann Littérature, 2006, p. 8.